Dead Boys
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De Frankeistein aux Dead Boys
Janvier 1975, Stiv Bators rencontre Jimmy Zero chez un disquaire de Cleveland. Tous deux fans d'Iggy & the Stooges, ils ont dans l'idée de monter un groupe. Quelques mois plus tard, ils font la connaissance de deux têtes brûlées qui jouent dans une formation locale nommée Rocket From The Tombs. Cheetah Chrome - guitare - et Johnny Blitz - batterie - ont un style et un look qui correspondent parfaitement au genre recherché: Stoogien.
Après avoir trouvé un nom de guerre, Frankenstein, et un bassiste, Jeff Magnum, les répétitions commencent. Zero est guitariste rythmique et Bators chanteur, le répertoire est composé de reprises des Stooges et de chansons de Rocket From The Tombs dont Sonic Reducer et Ain't It Fun que l'on trouve plus tard sur leurs deux albums studio. Leur philosophie est simple: «Fuck art, let's rock», tout un programme!
Frankenstein - Eve Of The Dead Boys
Au printemps 76, Stiv Bators se rend à New York où il rencontre Johnny Thunders et Joey Ramone. Ce dernier va avoir un rôle crucial dans l'évolution de Frankenstein. Il les invite à faire la première partie des Ramones et leur trouve un logement afin qu'ils s'installent définitivement à NYC. Dans la foulée, le groupe se rebaptise Dead Boys (tiré de leur chanson Down In Flames) et se fait remarquer par Hilly Kristal, le boss du CBGB's, à cause de leur attitude sur scène (en plus de leur musique punk passée au vitriol). En effet, Stiv Bators, ultra fan d'Iggy, s'inspire de son jeu de scène en allant toujours plus loin dans la déjante. Il joue avec des tampons périodiques usagés, fait le salut nazi et se fait faire des fellations (vraies ou fausses) par des fans. Kristal devient leur manager, leur trouve un deal avec Sire Records et les met en contact avec la productrice Genya Ravan qui va se charger de leur premier album Young Loud and Snotty. Genya est connue sous le pseudo «Goldie», chanteuse R&B des Escorts et de Goldie & the Gingerbreads dans les années 60.
Les choses débutent de façon chaotique car les Dead Boys, à l'instar d'autres groupes de l'époque, aiment jouer avec les visuels communistes et nazis. Jeff Magnum porte souvent un t-shirt avec marteau et faucille tandis que Stiv Bators fait plutôt dans l'aigle du IIIème Reich. Problème, Genya Ravan est d'origine polonaise et une partie de sa famille est morte dans les camps de concentration. Le groupe doit alors laisser les swastikas au vestiaire, condition sine qua non pour que le travail ait lieu. L'album est enregistré en quelques jours, et le résultat est assez incroyable. Genya Ravan a su transposer sur bande toute la folie des Dead Boys sur scène, les guitares sont percutantes, Bators déchaîné, et l'ensemble sonne différemment de ce qui se fait à New-York à cette époque. On est très loin de Television et Talking Heads et un ton au dessus des Ramones et des Heartbreakers question agressivité et vitesse d'exécution.
Dead Boys - Sonic Reducer
Le résultat est très bon, mais au bout de quelques temps, les ventes ne décollent pas, tout au moins pas assez pour Seymour Stein, le boss de Sire Records. Il va falloir défendre ce disque, et pour ça rien de mieux que la scène, jouer, jouer et jouer encore. Outre leurs nombreux passages au CBGB's (devenu en quelques sortes le QG du groupe), les Dead Boys partent fouler les planches aux quatre coins des States et même au-delà à partir d'Octobre, mois de sortie de l'album: San Francisco (Old Waldorf), Toronto (Crash n'Burn), Boston (Rathskeller), Hollywood (Starwood), puis l’Écosse et l'Angleterre où il partage l'affiche avec les Damned.
Dead Boys - Search and Destroy
Sire Records n'est toujours pas satisfait des ventes du disque et exige que le groupe change d'image. Plus de t-shirts déchirés, plus de provoc' avec les croix gammées ou l'URSS, et surtout plus de punk-rock, le son du nouvel album doit être différent, les chansons aussi.
Après une année 77 bien chargée, les Dead Boys débutent 78 en répétant de nouveaux titres pour le prochain album, We Have Cum For Your Children. Au printemps, Johnny Blitz est gravement blessé lors d'une attaque au couteau. Pour couvrir les frais d'hospitalisation, le reste du groupe organise des concerts de soutien début Mai, toujours au CBGB's, en compagnie d'amis tels que John Belushi, les Ramones, Debbie Harry, Richard Hell, Jerry Nolan et bien d'autres.
Concert de soutien 7 Mai 1978 CBGBs
L'album sort en Juin, produit par Felix Pappalardi, qui a travaillé entre autres avec Cream, il sonne plus propre, même si les chansons dans leur ensemble restent du punk-rock de très bonne qualité. Un son moins agressif, une image plus clean (voir la pochette de l'album) et cette reprise des Rolling Stones, Tell Me, plus ou moins imposée par la maison de disque, tout cela pèse sur le moral du groupe. De plus, le temps que Johnny Blitz se remette de ses blessures, aucun concert n'a lieu. La pression monte, Cheetah Chrome, sans concession, s'oppose à Stiv Bators qui serait prêt à mettre un peu d'eau dans son vin.
Dead Boys - tell Me
Les Dead Boys finissent par mourir une première fois courant 1979, puis se reforment, par obligation car ils doivent un troisième album à Sire Records. Fermement opposés à retourner en studio, ils enregistrent un concert au CBGB's au cours duquel Bators chante délibérément à côté du micro afin que les bandes soient inutilisables. Cet enregistrement finit toutefois par sortir en 1981 sur le label Bomp aux USA et en 1984, en France sur Lolita (FGL). Pour que le disque sonne correctement, les parties vocales sont refaites en studio.
Dead Boys - I won't Look back
Au milieu des années 80, le groupe se réunit de nouveau mais cette fois sans Jeff Magnum. Le 26 Décembre 1987, il joue au Ritz de New York, la performance est bonne, mais la folie des débuts a disparu, comme en témoigne le double LP Liver Than You'll Ever Be.
Dead Boys - Ain't it fun
Après s'être fait renversé par une voiture, Stiv Bators décède dans son appartement parisien le 4 Juin 1990. En 2004, le reste du groupe lui rend hommage sur scène avec Cheetah Chrome comme guitariste chanteur, un perfecto est posé sur un pied de micro au centre de la scène à la place de Bators. Même chose en 2005 pour un concert de soutien au CBGB's, menacé de fermeture.
Dead Boys - Sonic Reducer - Live 2005
En 2017, pour les 40 ans du premier LP, Cheetah Chrome et Johnny Blitz se réunissent à nouveau. Ils empruntent le nom des Dead Boys sans que Jeff Magnum ni Jimmy Zero ne soient de la partie, d'autres musiciens assurent le job pour une tournée et un album intitulé Still Snotty : Young Loud and Snotty At 40.
Dead Boys - Still young ans Snotty
Sur disque, les deux incontournables sont les albums studio Young Loud & Snotty et We Have Come For Your Children. Côté live, The Return Of The Living Dead Boys (Revenge Records) est plus excitant, plus brut que Night Of The Living Dead Boys (Bomp), les deux ayant un très bon son. Eviter Twistin' On The Devil's Fork, compilation de titres enregistrés au CBGB's en 77/78 et dont le son est boueux à souhait. Pour les complétistes, il existe des versions Rough mixes des deux albums, intitulés Younger Louder & Snottier et 3rd Generation Nation. Le premier étant nettement plus intéressant que le second. Enfin, au niveau visuel, le DVD Live at CBGB's sorti en 2004 permet de se rendre compte de la haute énergie du groupe sur scène.
Fernand Naudin
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